mardi 30 octobre 2012

Méfions-nous de la chanson française.


Mike Brant m’a rendu visite hier soir. J’écoutais Chérie FM et il est apparu. Comme ça sans préambule. Les paroles de sa chanson ont commencé à danser devant mes yeux, à prendre des formes créant des messages juste pour moi, son micro swinguait, son brushing ondulait, Mike me chantait sa chanson.
Aïe! Quitte à expérimenter les visites de chanteurs morts, j’aurai préféré Elvis.
















« Rien qu’une larme dans tes yeux.

Ouhlalala, arrête ça tout de suite. Je suis déjà en plein spleen hivernal. 
Tu es très fort Mike Brant, trois mots seulement autour d’une « larme » et voilà que je refais le film de ma séparation. Je fais pourtant tout mon possible pour ne pas penser à Pip. T’as pas compris que la cuisine, le sport, le jardinage, les Andréous, c’est pour oublier ? Juste avant cette chanson, j’étais un peu en séance de self-analyse. Peut-être bien que mes pensées vagabondaient dans la mauvaise direction et qu’une force surnaturelle, genre un dieu, a dû dépêcher Mike Brant et une radio pour me guider et poursuivre mon analyse correctement.

C’est toujours ta seule réponse.
Mike, je suis dans mon lit, bien gentiment, tu as de la chance que je ne change pas de radio, alors tes remarques désobligeantes, tu peux te les carrer  ranger dans un tiroir.

Quand je te dis qu’il vaudrait mieux,
Ne plus se revoir nous deux
Ça sent le Santa Barbara à plein nez ça. Il vaudrait mieux ? Ça veut dire quoi au juste ? C’est le grand tribunal des fées de Bontemps (je suis à fond dans le monde féérique de True Blood en ce moment. J’ai envie d’en être une) qui t’a prévenu qu’il vaudrait mieux ? Ou bien, tu as reçu une lettre de l’amicale des retraités de  Cravant – petit village Bourguignon où les gens sont très au courant des droits de l’homme et de la bienséance. Je connais un Cravanais. Pourquoi ne pas dire « je ne veux plus te revoir »? C’est mieux les choses directes. Et ta gonzesse t’en sera reconnaissante.

J’étais certain cette fois
Que tu me retiendrais
(Est-ce qu’il me parle de Pip et moi ? J’en mettrais ma main au feu, mes chamallows sur le barbecue !)
La règle d’or, mon cher, est de ne jamais être sûr de rien. En amour, il n’y a que des surprises. Mike, je sens que ton histoire est différente de la mienne. Tu m’as l’air confus. Tu veux quitter ta femme, mais tu veux qu’elle te dise de rester ? Je suis plus black and white que toi. Je pensais qu’on partait ou qu’on restait. Ceci dit, je suis qui pour comprendre l’Amour… ?

On se trompe quelques fois.
Ah ça oui. Ma première erreur c’était  d’écouter Chérie FM.  Etais-je nostalgique de mes années Parisiennes, ces années où dans ma Supercinq, en route pour la fac, j’écoutais RFM, Rire et Chanson et des fois Autoroute FM.


Une larme a tout changé
Ça y est, il remet ça le Mike. Si on parle de la mienne de larme, c’est au pluriel. Je pleure tout le temps. Je pleure d’abord et ensuite je parle. Un peu menstruel, j’ai remarqué que si je ne pleure pas, je suis chiffon en fin de mois, je ne trouve pas la synergie entre mon corps et ma tête. Il faut que j’expulse le stress et les mauvaises ondes par les larmes. Je suis par conséquent capable de pleurer en regardant Bob l’éponge et Patrick s’entendre à merveille ; l’amitié en particulier me fait pleurer.

Je me liquéfie s’il y a trop de générosité et de bonté autour de moi. C’est rare mais ça arrive. Je pleure aux réunions des parents d’élèves. C’est beau un gamin qui travaille très bien quand on croit toute l’année qu’il glandouille. J’ai refusé d’aller voir le dernier Spielberg War horse, avec le cheval qui pleure. J’aurais été capable de pleurer aussi ; trop gênant pour moi et pour mon voisin. La projection était réservée aux journalistes prestigieux de Londres. Je n’en fais pas partie hélas, mais je connais des gens. Et m’est avis qu’on ne pleure pas à ce genre de rassemblement.

Rien qu’une larme dans tes yeux,
Et soudain je réalise
Je réalise que de nous deux
C’est moi le plus malheureux
Mike, arrête ton char. D’après mon expérience, vous, les hommes, pouvez être aussi complexes et tordus que nous, les femmes. Voire plus. Et au passage, Mike, sacré déballage de sentiments. Chapeau!
Alors malheureux ? Un chien abandonné sur la route est malheureux. Un enfant à qui on ne tend pas la main, est malheureux. Nous, nous étions au-delà du malheur. Nous étions cassés, épuisés, vidés. Seule la distance nous guérirait, pas tes larmes, Mikey. 


Par ma faute trop de fois
Mon amour tu as pleuré
Puisqu’on en parle, Mike, oui. Là, tu l’as dans le mille. Ta femme et moi, on en a bavé. C’est pas le Vietnam mais presque. Betty Draper versus grosses boulettes de viande avariée. Nous sommes des vétérans du cœur brisé et si on nous chauffe un peu trop, on peut aussi casser des os avec nos talons. Et pleurer.


J’ai voulu partir cent fois
Et cent fois je suis resté.
Mike, je n’ai qu’un mot : salaud. 

Comment peux-tu aimer quelqu’un et vouloir partir. Si tu veux savoir, moi aussi, j’ai eu envie de claquer la porte et d’aller voir ailleurs. Prendre l’air, les mains dans les poches et rêver à une vie plus douce. Ça me fait penser que j’ai rêvé d’Ashton Kutcher la nuit dernière - c’est de lire Voici avant d’aller me coucher. On était très proche lui et moi, je lui remontais le moral, comme on fait pour un ami – il va pas bien en ce moment. Par contre, et je n’ai pas compris pourquoi, je lui disais que je ne pouvais pas coucher avec lui, non, car j’étais mariée. Que j’étais heureuse aussi, qu’il fallait qu’il me laisse tranquille.
Mama mia, même dans mes rêves je suis une vraie gourde. C’était le moment ou jamais de me faire plaisir, d’assouvir un vieux fantasme : prendre le petit déjeuner en tête à tête avec une star du cinéma !!! Et bien non, quand je rêve d’autres mecs, je leur dis que je suis pas dispo, que je suis mariée. A quoi ça sert de rêver d’eux alors ? Je suis trop chic fille, ça frôle le ridicule. Pauvre Ashton, il essayait par tous les moyens de me faire le coup de je te fais la bise et en fait, je t’embrasse sur la bouche etc…Une vraie canaille. Mais j’avais pas envie. C’est tout.
En me réveillant, j’avais un peu envie de pleurer, juste une larme. De sang.

Rien qu’une larme dans tes yeux
Je viens d’en parler !!!!!


Je comprends combien je t’aime
J’en étais sûre !!

Je t’aime et je veux te le dire
Je veux te revoir sourire
Passons l’incohérence de la strophe, c’est une chanson et d’amour qui plus est. Mike, je ne sais pas si tu étais Français ou Américain, comme ton nom nous induit en erreur, mais c’est lourd ce passage.  Lourd comme la barre de dix kilos que j’ai portée mercredi dernier. Au sport. Sinon, ça pourrait être comme pour Pip et moi.  On s’aimait mais on avait besoin de respirer.

Etc… »
J’ai éteins la radio. Quand c’est trop c’est Tropico. Soporifique le Mike en plus de me perturber émotionnellement. Et trop de « yeahh » « oinnn oinnnn » ; hey ho stop !
En fait, ça ne me réussit pas la  chanson française. Allez au dodo.






Merci à Olivia Chassagne pour ses illustrations sexy qui rendent hommage à la femme et la chanson française.








mardi 23 octobre 2012

Vive le sport!!!!


Nicole aimait bien me balancer que je n’étais pas assez hardie et qu’il fallait toujours remonter sur sa monture après une chute. Bien entendu c’était plus facile pour  elle de le dire, que moi, coincée entre deux arbres. Ma poney - un shetland – était déjà bien loin, partie chercher meilleure cavalière.
Des années d’équitation pour m’entendre dire ça. Il est vrai que ces bêtes imprévisibles me faisaient peur mais j’aimais passionnément les chevaux.
Je fais cette allusion à mes années jockey car voyant le désastre de mon expérience pour me faire des amis sur internet, quelque part ça m’a fait penser à Nicole, ma monitrice. Comment allais-je faire pour remonter sur un cheval ? En tout bien tout honneur.

En deux mille dix, le moral était au plus bas, la fête n’y était pas. Mais si on fait un petit saut dans le temps, deux mille douze a été plutôt prospère au niveau éducation physique. Je ne sais pas si c’est d’avoir lu un jour dans un pub « Wimbledon may  be over but we are reliving it with our strawberry and cream tart » mais ça m’a donné le power ce petit message. Je me suis dit, j’aime les desserts, oui, j’ai lu Wimbledon, pensé tennis, sport, Nicole, et en deux temps trois mouvements j’en étais à échafauder des plans pour m’y remettre. Le tout en sirotant une pinte. C’est dingue tout ça !



J’ai donc pris de bonnes résolutions. Je ne tiens jamais celles du nouvel an de toute façon, alors j’ai tout misé sur celles de Septembre. Pourtant j’avais pas envie. Etait-ce la fin de ma trentaine qui me tracassait et me poussait à faire des choses folles ? Les jeux olympiques peut-être ou de vous parler de mes sept années de cheval. Qui sait ?

J’avais envie d’un coach sportif personnel. Je voyais les choses  en grand. Il fallait de grands moyens pour quelqu’un dans mon état. Je rêvais tonus, muscles saillants et transpiration. J’ai fini par trouver Carlos dans les pages jaunes. A notre premier rendez-vous, j’ai été claire : Carlos, s’teupl aide-moi, transforme-moi, et je veux personne d’autre que moi dans ton local. Ce serait trop la honte. Et ça c’est avéré.
Il avait plus envie de déblatérer sur l’indice de ma masse corporelle et le calcul de mes protéines journalières. J’ai refusé catégoriquement de me peser et il était surpris de me voir surprise de commencer dès ce premier rendez-vous. Sans échauffement, sans préambule. Là tout de suite.

I like it !

Carlos est jeune, petit, je pourrai le mettre dans ma poche, musclé, trapu et porte un jogging of course. Carlos, parle vite et bouge vite. Il n’a pas vraiment le temps d’écouter mes palabres et mon inquiétude grandissante sur mes auréoles et ma lourdeur au niveau du bas du dos. J’avais eu trois enfants (Quoi??? Trois ???) d’où le mou sur le ventre. Non, il faisait le boulot qu’on lui demandait, me faire suer.

Ont donc suivi, après cet entretien, deux séances d’humiliations suprêmes.
Moi, en jogging. A côté de Carlos, en jogging aussi. Moi, incapable d’utiliser le rameur, de soulever les poids, ou de boxer sans me faire Carlos. J’ai réussi à tomber du tapis de course à la deuxième séance à bout de souffle, j’essayais de lui dire que ça allait trop vite. Comme Jessica Biel dans Valentine’s day, qu’on m’a forcé à regarder la semaine dernière.
 Moi, dégoulinante de transpiration. Ah ça, pas comme Jessica. A part à la piscine, je n’ai jamais eu les cheveux mouillés en sport. Le peu de fois où j’ai couru, c’était sous les bras uniquement, le mouillé. Mais c’était sans compter sur le studio « thirty minutes results » de Carlos et ses acolytes, probablement tous issus de la Grèce antique, lanceurs de javelot et précurseurs des J.O. Ames vouées au corps et à la sueur. Disciples de l’effort et de la torture mentale, ils n’étaient sur terre que par pur dévouement et promesse de changer les gros humains en athlètes pour la survie de leur espèce.
Mon corps entier ruisselait, perlait, tremblait. Mes sourcils étaient restés en position étonnement – surprise - pendant l’entière demie heure. Mais Carlos s’acharnait toujours sur moi.
« Allez Mawie, encore trente comme ça !!!!! »

Je pensais aux représailles.

Ces satanés fesses m’empêchaient de faire la moitié des exercices, elles étaient bien trop lourdes et n’obéissaient pas à ma tête. J’avais envie de rentrer à la maison et de me réfugier sous la couette. J’entendais à la place,  Carlos compter de un a dix en répétant trois fois le huit. Salaud.
Ah, c’est l’heure ? Etirement, serrage de mains et à la semaine prochaine. Il m’a conseillé de manger en rentrant et de boire beaucoup d’eau.
Il n’y avait qu’un pain aux raisins qui trainait dans la cuisine, je l’ai mangé en me disant que je l’avais bien mérité et qu’un jour je serai hot (musclée/bonne) comme Jessica Biel.




Merci mille fois à Julien Malland pour ses illustrations et Linda pour ses pains aux raisins









mardi 16 octobre 2012

Les Cybermecs


Bonjour et bon mardi.

Suite et fin du thème qui nous préoccupe : les rencontres sur Internet. J’insiste, je sais, ça fait trois mardis que je vous rabâche le même sujet, je sais, mais c’est mon blog, j’y fais ce que je veux.

Je disais donc… aucun homme ne retenait vraiment mon attention sur ces sites. Je prenais par contre de l’assurance et draguais en veux-tu, en voilà. Je me prenais des vestes aussi. Beaucoup. En fait, les beaux mecs, ceux que je trouvais canons, ceux où je me disais : « putain, si celui-là,  je lui plais, qu’il me répond et qu’on se rencontre samedi prochain et que peut-être il a une maison dans le Somerset, qu’il veut absolument que je vienne à son vernissage et que peut-être en route dans sa décapotable, je mettrai un foulard parce qu’il y aura du vent etc… » Et ben, ceux-là ne répondaient jamais à mes 
« Coucou ça va ? ». Jamais.


Par contre, de sacrés numéros m’ont contacté. Y’a eu celui qui adorait les chiens. Sur toutes ses photos, il était affalé avec ses cinquante chiens. Sur son canapé, dans sa cuisine, nez contre nez. Il sentait bon le terroir et l’honnêteté. Un mec qui ose mettre dix photos sur son profil, au lieu de deux suffisantes, toutes avec un ou cinquante chiens, c’est que vraiment, c’est sa passion. On sait de suite à qui on a affaire. Je pensais pourtant avoir bien mis cheval only à animaux. Et juste par loyauté.
Peut-être qu’il avait craqué en voyant mes photos de trois quarts.

Y’a aussi eu Tom, le sportif, qui me demandait si j’aimais le trekking dès le deuxième échange.
Je m’arrête deux secondes. Est-ce que j’aime le trekking ?
A-t-il lu mon profil ? Des heures de questionnement et de remise en cause. Est-ce que j’avais mis que je faisais, ou même, que j’aimais le sport ? Non. Le trekking encore moins. Je n’aime pas marcher pour aller chercher ma fille à l’école, alors juste l’idée de marcher dans le désert avec Tom, me donne des hauts le cœur. J’ai mis fin à cette correspondance immédiatement.

On n’allait nulle part là.

Jenny au chapeau de cow-boy (une de celles qui ont un verre à la main) a profité de mon scepticisme pour me dire que, sans rire, j’avais des yeux magnifiques. J’ai dit merci à Jenny. Enfin quelqu’un qui avait vu la beauté telle qu’elle était. Jenny a encore un peu insisté. Pour ma carrière de lesbienne, c’était le moment ou jamais. Mais j’ai préféré lui interdire l’accès à mon espace-rencontre. Elle était trop collante et pas mon style.

Jusqu'à Andréou. Photo stylée et soignée, un petit air de Sherlock Holmes pour ceux à qui ça dit. 
Il avait l’air différent des autres et plus tourné vers la culture. Vu la tournure des choses, j’avais renoncé au prince charmant, mais je pouvais me faire des amis. Ce que je m’échine à dire depuis le début. Une rencontre déboucherait sur un nouveau monde et  d’autres gens. D’autres princes charmants.
On n’a pas attendu trop longtemps pour se retrouver dans un musée, j’en avais un peu marre d’écrire en fait. C’était l’hiver.  Il neigeait un peu. C’était une grande première pour moi de rencontrer un inconnu, j’avais choisi un endroit public, car je suis méfiante et trouillarde. En arrivant dans le hall du musée, la peur au ventre, il m’a fait signe, je n’ai reconnu que la  petite moustache. Aucune trace de Sherlock Holmes. S’il avait l’air grand et fin sur la photo, il s’était ratatiné entre temps et mangé au KFC tous les jours. Andréou était petit et gros. Un p’tit gros. J’ai normalement rien contre, mais Andréou avait menti sur la marchandise et pas joué le jeu des rencontres sur internet comme il fallait. D’accord, j’ai dit que j’étais là pour créer des liens amicaux, mais j’appréciais moyen ce changement en cours de route. Pas cool Andréou, je fais quoi maintenant? Je vais pas te dire « ah non je peux pas, faut que je reparte car tu es petit et gros ». Malgré ma déception, nous allons  boire un café à la cafète et Monsieur sort fièrement sa carte de membre. Super. Va, pour un café. Andréou est roumain. Andréou est féru d’Histoire aussi. Et il parle couramment le français. Je me suis fait le Andréou pendant quasi deux heures, il m’a sorti la bio de Napoléon, ce que ce grand monsieur a fait pour les écoles roumaines et l’admiration sans bornes qu’ont les Roumains pour la France. Napoléon. C’est mon père qu’aurait dû être assis là avec Andréou, ils se seraient adorés. Ça lui aurait fait plaisir qu’Andréou soit mon nouveau fiancé.
Sans le faire exprès je le jure, j’arrêtais pas de parler de Pip. Le moindre sujet avait un lien avec lui. Je m’en rendais compte et je me faisais un peu de la peine.

Allez Andréou, si t’as ta carte de membre, on va se faire l’expo Pop art. Il y avait une salle fermée avec un panneau sur une porte disant que l’accès était réservé aux personnes de plus de 18 ans. Tiens, tiens j’me suis dis, cool, c’est pour moi ça. Mon côté canaille a écrasé mon côté alerte rouge. J’adore les interdits.

Andréou n’avait pas l’air convaincu. Il l’avait déjà vu, il avait trouvé ça bof bof. Andréou, je suis une femme libre. J’ouvrai magistralement les deux portes et là, je tombai sur les photos format géant de La Cicciolina, prises par son mari de l’époque, Jeff Koons.
J’ai regretté à l’instant même où j’ai franchi ces deux portes. Madre mia.
La Cicciolina sur un rocher, la Cicciolina et son intérieur – pas chez elle - les fesses de la Cicciolina, ouhla  son poupoute. Aaahhhhh arrêtez !!!!

On voyait tout ; et j’étais avec ce mec que je ne connaissais pas. Malgré mon embarras, je l’ai joué très détachée, très scène de crime. Tel un professeur les mains dans le dos et l’air pensif. Grand moment de solitude. Après ça, j’ai invoqué la neige, dit  à Andreou que j’habitais hyper loin, que si je rentrais pas maintenant, je serai coincée pour la soirée. Je sais que ça lui aurait plu l’idée de m’héberger pour cause de neige, mais j’étais  pas là pour améliorer les échanges culturels Franco-Roumain. Allez, la bise et je suis partie. Quel désastre. Désolée Andréou mais on recherchait pas la même chose je crois. J’avais, le lendemain un goût amer de m’être fait avoir et d’avoir dû être un peu sèche avec quelqu’un de gentil. J’ai fermé mon compte sur le champ et dis adieu au prince charmant de l’internet.


Illustrations de Stéphanie Lollichon. Quel délice de vous avoir chaque semaine mes amis.




mardi 9 octobre 2012

A l'attaque!


On est lundi matin (sur ma planète), et tout commence le lundi : le régime, le nouveau boulot, le patch Nicorette sur ton bras, les machines à laver et  parfois, les emmerdes.

Pour commencer ce business de dating online, je devais me décrire avec l’objectivité d’une personne honnête, simple et intéressante. Trouver une accroche, faire envie, sans faire pitié. Faut pas se leurrer, les gens qui vont sur Internet pour draguer, sont un peu au bout du rouleau et il est sage de garder à l’esprit  ce précepte afin d’éviter toute déception. C’est un peu comme jouer sa dernière carte. Après ça, on se maque avec Frank Moreau, celui que personne ne veut, parce qu’il nous arrive sous le bras et qu’il est gentil. On n’aime pas les gentils. 

Cette histoire de profil m’a un peu retardé dans mon planning. Ça m’a pris un temps insensé et j’en suis venue à me poser des tas de questions qui n’avaient jamais traversées mon esprit avant.



Mes passions ? Le cheval ? J’en ai fait pendant sept ans quand même.
Mon métier ? J’en ai pas. Ou néant. Mais il fallait que je remplisse la case sinon, ça laissait entendre que j’étais entretenue, glandeuse ou chômeuse. Ou que je ne m’intéressais pas à grand-chose et là, on en revient à mes hobbies.

Mentir alors ? Bah oui, merde ! Créer des mythes mais pas très éloignés de la vérité. Le mystère. J’envoûte dès la lecture de mon profil, on veut me connaître et en savoir plus. Je serai donc journaliste pour un magasine français (pas de nom. Si on demande c’est du Elle ou du Vogue), sans enfant mais je les adore tous autant qu’ils sont. Indépendante, drôle. Rigolote ? Amusante ? Non. Qui aime rire ? Ou bon public ? Nan, ça fait la nunuche qui n’a pas d’esprit. Bref, j’ai passé beaucoup de temps à fabriquer ce mystère.
La dernière case était champ libre, exprimez-vous, j’ai donc dit :
J’aime la simplicité, allons boire un coup et je vous dirai tout au deuxième verre. C’est accrocheur non ? Les Anglais aiment les filles qui boivent, c’est donc de bon goût d’en parler.

Etape numéro deux : choisir une belle photo. Je voulais paraître sous mon meilleur jour mais sans me révéler de trop. J’avais peur qu’on me reconnaisse dans la rue, comme c’était arrivé à mon ami Mat. Je balance les noms. Hors de question qu’on sache ce que je manigançais. C’était mon secret. Pas envie qu’on aille rechercher mon profil pour me faire des blagues, que par exemple je me pointe pour un verre avec en fait cousin machin. Ou que Pip en ait vent.

J’ai choisi une photo de trois quarts. On ne voit que le côté droit de ma tête et c’est mystérieux. Ça peut donner envie aux gens de se déplacer pour vérifier le mystère de l’autre côté. Un peu comme le mal et le bien. Le pile et le face ou le Double-Face dans Batman. Analogies certes inadéquates pour rencontrer des gens sain d’esprit, mais le thème choisi était le paradoxe : montrer sans dévoiler. C’était ajouter une difficulté de plus à ma tâche certes, mais je ne pouvais décemment pas mettre mes photos de vacances : le bikini n’était pas mon atout cœur. Ni de famille : je suis sensée être indépendante et sans enfants. Ni d’identité : on a pas le droit de sourire sur les passeports, et je donne pas envie sans un petit sourire. Ni déguisée : je n’en ai qu’une où je suis déguisée en papillon et j’ai vingt ans. Oui, non ? J’ai fouiné un peu sur les autres profils de filles et j’en ai vu pas mal déguisées en cow-boy (girls) ou en train de faire la fête un verre à la main et l’air de vachement s’éclater, de n’avoir besoin de personne. Moi, je dis à ces filles qu’elles feraient mieux de se faire des mecs sur place pendant qu’elles dansent. Et de nous laisser, à nous, femmes en difficulté, l’espace de rencontre-internet libre.

Là, je suis sûre, vous vous dites que mes aptitudes sociales laissent à désirer. Qu’il faudrait peut-être que j’envisage un premier appel gratuit à Josée Raymonda, coach de vie - et masseuse les mardis - pour une évaluation et quelques conseils sur l’Autre en général. Ça doit être le décalage horaire mais je vous répondrais : solitude, abattement, Peter et Sloane et je fais ce que je peux !

Bon, une fois la paperasse et les descriptions mystérieuses accomplies, c’est comme à La Redoute, on feuillète et on fait son marché, sans s’éloigner du  but : draguer, rencontrer des mecs et j’aime ajouter, se faire des amis. 

Alors, écrire à des inconnus sans passer pour la correspondante de quatrième, ce n’est pas simple non plus:
« Salut, ça va ? » Non. Un peu nase. Comme si on s’était parlé la veille. S’il est sur ce site, c’est que ça va moyen ou sinon il serait avec sa, ou ses,  gonzesses à Chamonix (prononcé Chamoni) à boire son vin chaud sur la terrasse de son chalet. D’ailleurs la photo de son profil les montrerait en train de jouer à celui qui descend le plus vite la piste noire a gagné son vin chaud à la cannelle et en a dans le slip, viens le chercher il est sous la couette. Le vin chaud.

On évite aussi les questions en rapport avec le pourquoi et le comment il est arrivé ici. Sinon, je vais être obligée de faire pareil.

« Coucou, tu fais quoi ? » Coucou ? Dans la vie ? Maintenant ? Mais ça fait trop la fille qui veut savoir si le mec a une situation intéressante et de l’argent pour le resto, non ?

« Bonjour, je m’appelle Marie me, j’ai vu que tu aimais les… animaux. Hey, moi aussi!!». Equitation pendant sept ans. Alors là, c’est assez osé, je dois dire. On va droit au but. On aime ou on n’aime pas.

Vous voyez, c’est pas évident ; tout ça en anglais of course, gros cafouillage au niveau des codes, que peut-on dire ou pas dans ces situations, je ne sais pas.

Alors au lieu d’écrire, j’ai fermé les yeux en attendant qu’on m’écrive.
Et les messages sont arrivés.

Mon premier flirt virtuel se prénommait Nick. Pas mal physiquement (on s’attache vraiment à ce genre de détails quand on est derrière son écran), prof et sympa. Prof mais sympa ?
En papotant un peu, il me dit qu’en fait, il n’a pas 35 ans comme il parait sur les photos mais 58. Silence. Glurp.
J’avais pourtant bien précisé dans mes recherches et dans mon profil que je ne prenais rien au-dessus de 45 ans. Et que je commençais à partir de 24, pour voir.
Il m’expliqua que c'est parce qu'il avait peur que ses élèves le reconnaissent qu'il avait sorti les vieilles photos de jeunesse.
Je l’ai complimenté sur la supercherie, dit que moi aussi j’avais eu du mal à choisir une photo, et notre relation épistolaire a continué comme elle avait commencé, glauque et ennuyeuse.

Tchao Nick au suivant.

On aura compris que chez moi, toute entreprise même petite, est laborieuse et qu’il faut vraiment avoir la foi pour ne pas décrocher avant la fin. Mais je l’avais.



* Illustrations cette semaine de Candice Hazard. Merci Cancan, tu reviens quand tu veux!





mardi 2 octobre 2012

Garçon! Un Marie me s'il vous plait!!!


Septembre, c’est la rentrée, les nouveaux cartables et les nouvelles fringues. Pour vous, ça sera aussi du Marie me tout frais.
Tac tac boum boum ! Y’a pas que Bebel qui peut descendre les marches, la jambe légère et le regard chaleureux. Y’a moi. La fin de l’été me va à ravir et je vais vous le montrer ici et maintenant.

Reprenons là où on en était. 2010.
J’avais toujours deux enfants, je vivais dans un délicieux petit cottage au nord de Londres mais je n’étais plus avec mon mec. Qu’est-ce qui était mieux, hein ? Vivre sans un mec ou sans ses enfants ? Réponse : ça dépend des jours.
Comme je l’évoquais précédemment, il y eu une période douloureuse, mais de nature guerrière, ma bonne humeur  a vite repris  le dessus pour m’ouvrir les portes du bonheur.

2010, l’année de tous les dangers. Enfin en bon terme avec mon célibat, j’étais ouverte à toute proposition. Legally blonde vous connaissez ? J’étais Reese Wetherspoon jetée en pâture aux Anglais : allez régalez-vous je suis célibataire (de la confiture aux cochons). Je débarquais en ville avec mes valises (mes gosses) et mon chiwawa rose (…). C’est bien simple, le monde m’appartenait.
Plusieurs options s’offraient à moi : rester sagement à la maison et tenter de m’atteler à la bonne cuisine de Jamie Oliver - en demandant à Oscar de me filmer in situ puisque plus personne n’était là pour le faire. Tant pis si le sale gosse se filmait plutôt les mains et le bout des chaussures en imitant un papy qui marche sur des patins parce que c’était rigolo. 


Tant pis si pendant ce temps-là, il venait juste de rater le moment hyper important, le presque dénouement, où je coupais un oignon géant comme un chef et sans pleurer. Comme un chef : pas comme un champion mais comme un putain de chef quatre étoiles, les mains parfaitement synchronisées et le hachement en staccato venu du ciel.
Pffff, pourquoi s’acharner sur la vie et les gens. Je pouvais aussi faire du ménage, ramasser les feuilles mortes, faire des gâteaux bien sûr et des machines à laver, du café des fois, enlever les traces de mains chocolatées dans les escaliers, récurer les chiottes, bref, l’intendance et tout plein de trucs intéressants.

Mais moi, j'avais choisi l'option numéro deux! Tchao le ménage, bonjour Londres-la-ville!!!! Je voulais m'amuser, profiter de la life, me refaire une jeunesse, les seins si possible, rencontrer des mecs si la chance me souriait.
Bien entendu, pour ne pas passer pour une petite bitch, je rappelle que cette période succède à une autre vraiment triste et morose. 
Mais on est pas là pour en parler, on est là pour se marrer !!! C’est mardi, c’est Marie me après tout! Waouh !!!

J’avais une to do liste en tête. Je commençais par le dating online. Si ma mère avait su, elle aurait été  ravie. En avance sur son temps, elle me l’avait déjà suggéré à l’aube de ma trentaine. Elle était alors, très inquiète à mon sujet. Elle s’inquiète vite, faut dire. Tout ça parce que je ne lui avais pas présenté un mec en deux ans (pouvais pas tout lui dire non plus). « Va sur internet » qu’elle me disait « on trouve de tout, même un mari, tiens, regarde machine, la fille de truc…. ». Un mari, un mari, elle y allait bien fort. J’étais pas contre un coup d’un soir pour commencer, relancer la machine quoi (pouvais pas en parler non plus). Elle m’avait acheté le guide du « Comment rencontrer l’Amour sur internet ».
Pfff, ça m’avait bien énervé à l’époque. Mon refus était catégorique, je ne m’abaisserais pas à ça, je préférais les rencontres naturelles.
Celles qui n’arrivent jamais.


Mais là, mes années londoniennes m’avaient épuisée, j’étais plutôt borderline niveau moral et je devais régulièrement faire un doigt du milieu à la déprime. Non mec, très peu pour moi. Je suis un vrai petit pinson dans le cœur et je crois bien que je peux m’amuser avec ce truc de rencontres sur internet. Et me faire des maris. Des amis. Des coups d’un soir !

Mon guide en poche (étrangement je l’avais gardé dans un carton, il a fait huit déménagements, trois échecs amoureux mais il était là quand j’avais besoin de lui. Un ami, un partenaire pour la vie) (c’était l’édition 2000, j’ai dû faire quelques mises à jour). Je me lançais donc dans cette aventure cybernétique, car il fallait se rendre à l’évidence, je n’étais entourée que de gens en couple qui ne pouvaient rien pour moi. Tous leurs amis et les amis de leurs amis sur trois générations étaient maqués. 
C’était un moindre effort pour un résultat qui pouvait être immédiat et intéressant: passer le temps, oublier le reste, le moche ; tout ceci depuis mon canapé.

Han la paresseuse…


* Illustrations de Peter Ayers. Un grand merci.