On m’a demandé de
participer à un petit projet sur le bonheur. Pfff, la tuile. C’est vaste comme
sujet et en plus, je préférerai franchement écrire sur la fatigue. Ça me parle
en ce moment, enfin, ça me tient au corps comme un thermolactyl trop petit que
j’arriverais pas à ôter. Pour le coup, c’est un peu l’antithèse du bonheur.
Je SUIS fatiguée.
C’est le syndrome George. Avoir un bébé dans sa vie, qui plus est un troisième,
ça fatigue. La journée, je n’ai pas le droit à l’erreur. Je suis obligée d’être
au garde à vous et tant pis si je ressemble à Droopy après mes trois couches de
BB crème. Pas de micro sieste, pas le temps de regarder par la fenêtre en
s’imaginant ailleurs, pas le droit de s’endormir en nourrissant George ou en
marchant dans la rue avec la poussette. Pas le droit de lâcher, par
inadvertance of course, cette poussette parce qu’on parle avec sa voisine et
qu’on a trois sacs à main dans les bras. Le mien, celui du bébé et celui de la
poussette. Non, ça craint.
La voisine est
vieille et aveugle d’un œil, j’ai pu faire diversion aisément et prétendre
m’être fouler la cheville tout en lui parlant, alors qu’en fait j’avais bien
lâcher la chariote et le bébé sur la route.
Il fallait que
j’invente une excuse ; son unique œil avait été témoin de la panique sur
mon visage. J’avais pas vraiment envie qu’elle raconte je ne sais quoi à mon
sujet, aux autres voisins tous détenteurs de la carte vermeille. Sont tous
vieux mes voisins, mais faut s’en méfier quand même. Fatiguée mais vive
d’esprit !
Ça nous éloigne
légèrement du bonheur ce manque de sommeil. Que faire ? Encore six mois,
peut-être un an. C’est long. Ou alors je prépare un plan d’attaque pour
récupérer ce sommeil et me débarrasser de mes yeux de panda.
Rosie d’abord. Si
elle arrête de se mettre le doigt dans le nez, elle ne débarquera plus en
pleine nuit, la bouille en sang comme Princesse Mononoké. Je ne serai plus
réveillée en sursaut, tout en ayant la présence d’esprit de ne pas réveiller le
bébé. Il me faut donc du scotch et des petits clous pour lui mettre au bout des
deux index. Hop ! C’est réglé. Le bébé ? Hum, délicat, il est malin
et imprévisible. Il peut surprendre à faire une nuit complète, sans prévenir.
Le jour où c’est arrivé, j’étais pas prête mentalement, je me suis réveillée à l’heure
habituelle : quatre heures. Rien, pas un bruit. Mais impossible de me
rendormir. Il faudrait remplir le dernier biberon du soir de cailloux. Je suis
prête à tout, je paye même, s’il faut. Je DOIS dormir.
Je peux aussi
l’empêcher de dormir toute la journée pour être sûre qu’il fasse ses nuits.
Vous connaissez la goutte chinoise ? Allongé, bras et pieds liés (pas
obligé pour un enfant), une seule goutte d’eau entre les (deux) yeux pour
empêcher la personne (ici l’enfant) de dormir. Si tout se passe bien, au bout
de quelques heures, le sujet est
extrêmement fatigué. Après une séance chinoise, on dort 24 heures. De la
torture ? Oui, peut-être. La fatigue, ça vous donne de drôles d’idées.
Bon, c’est pas grave, j’en ai d’autres dans mon chapeau. Le grand ? Il
dort et quand bien même il ne dormirait pas, il est tout en haut, je ne
l’entends pas. Le mari ? Il est dans mon camp mais il peut ronfler des
fois, et ça, à quatre heures du mat, quand on fait mentalement sa liste de
courses du lendemain et qu’on est conscient que c’est affligeant, qu’on ferait
mieux de dormir… ça énerve. Ça donne envie de faire du Taekwondo. Schlah !
Dans le cou. Il ronflera plus. Je rigole. Je l’aime, quand même ! Il
paraît que siffler peut marcher mais je le déconseille si on veut s’endormir.
La violence n’est pas la solution, d’accord, mais je ne dors toujours pas.
Le hamster ?
Je lui ai démonté sa roulette. La gym, c’est le matin, Buster (c’est son petit
nom de hamster), pas la nuit. Sa mezzanine, où Monsieur se croit sur la promenade
des Anglais pour admirer la lune et nous toise de ses moustaches rousses. Y’en
a plus. C’est du plat, on dort dans sa caisse le hamster !!!!
Donc, le bonheur,
je préférerai en parler la semaine prochaine, j’aurai une vision plus adoucie
car j’ai la ferme intention de me rattraper et de penser positif et bonheur. Je
me sens comme dans le film Insomnie.
Tout est sombre, bas de plafond, il fait nuit à 3.30pm, juste avant le goûter.
Oui, en Angleterre, il fait nuit assez tôt en hiver. Je pense à Rio. Hier, il
pleuvait. Ça paraît futile comme information. Mais non, il pleuvait, il était
2h00 pm et il faisait gris foncé presque noir. Comme la nuit. Je pensais aux
Antilles. Ça a envoyé des signaux à mon corps qui s’est dit qu’il était bientôt
l’heure d’aller se coucher, et ma fatigue s’est intensifiée. C’était au feu les
pompiers dans ma tête. A peine le temps d’une cup of coffee et de se remettre de sa courte nuit, paf, il refait
nuit.
J’attends avec
impatience qu’il soit 20h30, heure d’aller au lit pour tout le monde, même
maman. Et c’est pas 20h31, c’est trente. Tout est chronométré au risque de
paraitre un peu caporal sur les bords. Je m’en fiche, je suis foutue, ma cote
de popularité à la maison a chuté de 90%. Ma fille me dessine en ce moment,
avec les sourcils froncés, une
bouche comme Le Requin, le méchant dans James Bond. Un milliard de dents
carnassières. Je fais toujours un « ouh » de surprise, quand elle me
montre mes portraits. Je dis « mais c’est qui ça ? » « Bah,
c’est toi maman ! »
Ceci n’est pas le
bonheur. Dire qu’avant, elle me dessinait avec des belles robes flamencos, des
talons hauts, toujours du rouge sur la bouche et sur les ongles, parfois les seins qui sortaient du
décolleté, mais c’était un genre. J’étais belle. Heureusement, un petit sourire
de mon George ou un bisou bien claqué d’un des deux autres, une rivière de
diamants de mon mari, et je me rapproche doucement de ce concept que sont le
bonheur, la satiété, le contentement. Le bonheur, ça peut être
simple comme une bonne nuit dans son lit douillet.
Avec une rivière de
diamant.
Y’en a bien qui
dorment avec du Chanel N°5 !
Merci à Miss Rivers pour les illustrations de cette semaine. Et of course à Rosie.
deux illustratrices d'un seul coup !! Bravo !
RépondreSupprimerJ'avais aucune idee. Je ferais le biberon ce soir, eh cherie... Px
RépondreSupprimerTu savais pas que je pensais a la torture comme solution? Désolée, je ne peux pas m'en vanter non plus!
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